Кафедра и трон. Переписка императора Александра I и профессора Г. Ф. Паррота — страница 30 из 183

Enfin, Sire, l’objet de la langue est le dernier sur lequel j’ose me permettre des observations. Je reconnais en ce cas la supériorité politique de la langue russe[705], et cela par l’unique raison que c’est la langue paternelle de Votre Majesté. À Vos yeux, Sire, tous Vos sujets sont égaux; et si Votre nation semble se ressouvenir encore que la Livonie est une province conquise, je suis sûr, Sire, que ces idées de conquérant ne sont pas dans Votre Cœur magnanime.

Voilà mes raisons. Peut-être ne paraîtront-elles pas suffisantes à Votre Majesté. Daignez m’accorder la grâce d’oser les appuyer de nouvelles, exprimées de bouche. Et même dans le cas où de nouvelles raisons seraient inutiles, daignez, Sire, m’accorder cependant quelques instants de Votre présence. C’est un fond de bonheur que j’emporterai pour le reste de ma vie.

Parrot

10. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg, à la fin de novembre 1802]


Sire,

Votre Université de Dorpat, sur le point de recevoir de la bienveillance de V. M. I. une nouvelle organisation vivifiante, sent le besoin d’avoir en Allemagne un Correspondant littéraire qui l’instruise promptement des principaux événements de la littérature étrangère, tels que encans considérables de livres, apparition de nouveaux ouvrages d’importance, nouvelles découvertes dans les sciences etc. – et qui lui fournisse en outre des renseignements sur la personne de plusieurs savants et artistes qu’il importe à l’université de connaître, et se charge de différentes commissions relatives à ces objets.

Or, Sire, nous avons trouvé un sujet très propre à cette place dans la personne du Conseiller de collège Doppelmayer qui a servi avec distinction pendant 17 ans en qualité de Docteur de Gouvernement à Moscou, puis de médecin de la Cour sous le règne de Sa Majesté l’Empereur défunt dont il avait l’honneur d’être connu personnellement. Des infirmités provenant d’une double fracture à la cuisse l’ayant mis hors d’état de faire son service, il obtient son congé avec une pension de 2000 Roubles, et s’établit dans la ville de Dorpat depuis l’érection de l’Université. Ses infirmités augmentant de jour à jour, ce brave homme désirerait jouir du climat moins âpre de l’Allemagne méridionale devenu absolument nécessaire à sa conservation. Mais en même temps il s’estimerait heureux de tenir encore à la Russie et en quelque sorte à Votre Majesté Imperiale par une tâche qui ne soit pas au-dessus de ses forces. L’ouvrage d’une correspondance assidue avec notre Université conviendrait parfaitement à son activité intellectuelle et morale, et à son désir d’être utile, et je suis chargé, Sire, de supplier V. M. I. au nom des membres de l’Université et du Conseiller Doppelmayer de lui imposer ce devoir, en lui accordant la permission de jouir à l’étranger de la pension qu’il tient de Votre auguste Prédécesseur1.

Sire, en demandant cette nouvelle grâce à V. M. I. je sens que j’augmente la masse de mes dettes envers Vous, et que notre reconnaissance – Non, je ne me chargerai pas de ce devoir. Que l’université trouve elle-même le moyen de Vous exprimer ses sentiments. Vous savez, Sire, combien peu je suffis à exprimer les miens. —

11. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg, 4 décembre 1802]1


Sire,

Chaque jour, presque chaque heure amène une nouvelle objection du Comte de Sawadovsky contre l’acte de fondation que V. M. I. avait déjà approuvé et cet ouvrage conçu avec tant de soins, fondé par les principes les plus équitables, amendé par les observations de Messieurs de Novossilzof, de Czartorinsky, de Pototsky, Stroganoff même, avoué par le Général Klinger, perfectionné par Votre Majesté elle-même enfin, à qui il ne manquait plus qu’une formalité, va devenir inconséquent sous la plume de Ministre de l’instruction publique2.

Je souffre doublement, d’un côté de voir inventer des défauts à un ouvrage qui ne doit respirer que la justice et la saine raison, d’un autre de savoir qu’il paraîtra sous Votre auguste nom.

Sire! Il était dans le bonheur que je cherchais pour moi-même dans cet ouvrage l’idée de Vous voir devenir là l’idole des gens de lettres, de l’étranger comme Vous êtes le nôtre. Et l’on veut m’arracher cette jouissance! Sire! Je n’ai plus qu’une prière. Daignez avant de décider, m’accorder dix minutes d’audience – puis disgraciez-moi.

Vous seul pouvez sentir ce qu’il m’en coûte à prononcer ce mot fatal. Vous seul savez ce que j’y perds. Mais mon devoir parle, et je dois à l’université, à Vous-même, de sacrifier ce que j’achèterais chaque jour un prix de mon sang, sans croire l’avoir payé.

Sire! j’attends Vos ordres3.


Le plus heureux ou le plus malheureux de Vos sujets

Parrot

12. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat, 23 décembre 1802]1


«Grosser Geist! der Welten schuf um sie zu beglücken! Wache über unseren Monarchen. Erhalte uns unseren Alexander. Nimm, o nimm von unserem Leben um das Seinige zu verlängern!»2

Tels furent, Sire, les derniers mots de la publication de l’acte bienfaisant que nous devons à Votre Majesté. Tels sont les sentiments qui pénètrent nos cœurs.

Sire! Si le vrai sentiment a réellement le pouvoir magique de se faire reconnaître sous quelques dehors qu’il se présente, malgré la distance énorme de Votre Majesté à nous, Votre grand cœur Vous dira que l’Université de Dorpat n’a qu’un sentiment pour Vous, qui n’a dans aucune langue aucune expression assez pure: la flatterie a corrompu toutes les langues. Soyez Vous-même, ô le plus chéri des Monarques! l’interprète de nos cœurs. Mettez Vous à notre place. Imaginez qu’un grand homme ait sacrifié ses soins, ses veilles, son repos pour Vous arracher à l’oppression, pour Vous ouvrir une carrière sublime, celle d’éclairer les peuples. – Ce que Vous sentiriez pour cet Être supérieur, nous le sentons pour Vous; le dévouement sans bornes que Vous auriez pour lui, nous l’avons pour Vous sans réserve.

Sire! Régnez sur nos cœurs.


Au nom des membres de l’Université impériale de Dorpat

Parrot

13. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat, au début de janvier 1803]


Sire,

Parmi tant d’heureux que la générosité de V. M. I. a faits en comblant de bienfaits notre Université, il est quelqu’un qui a souffert, notre ci-devant vice-curateur le Mr. d’Ungern-Sternberg, qui avait fait plusieurs sacrifices pour remplir une place qui depuis est devenue inutile par l’acte de fondation1. L’Université désire unanimement effacer tout sujet de mécontentement ou de chagrin de sa part en lui accordant 1000 Rbl. de pension viagère. Elle peut le faire sans causer un tort notable aux établissements qu’elle doit soutenir. Veuillez, Sire, lui en accorder la permission; outre les raisons que Votre cœur magnanime Vous suggèrera, il en est une qui tient de trop près aux circonstances pour oser la taire à V. M. I.

Ayant joui du bonheur ineffable de traiter de l’affaire de notre nouvelle fondation avec Votre personne chérie, Sire, le vulgaire suppose que j’ai abusé de ce bonheur pour agir contre nos curateurs. J’ai fait le contraire; il est dans mes principes de faire mon possible pour dédommager le vice-curateur, n’ayant pu conserver cette place, et je crois y être d’autant plus obligé que nous avons paru depuis longtemps mécontents l’un de l’autre, sûr que V. M. m’honore de trop de confiance, pour supposer quelque connivence entre le Baron d’Ungern et moi. Ayant augmenté le nombre de mes ennemis par les succès que l’Université doit aux grâces particulières de V. M. I., daignez m’accorder la satisfaction qu’il n’en existe aucun qui ait un prétexte fondé, ne fut-ce qu’en apparence, de l’être.

J’avais écrit à cet égard au Ministre de l’instruction publique. Mais comme je ne pouvais lui communiquer ces raisons, pardonnez moi la liberté que j’ai prise de Vous les offrir. Sire! Est-il un genre de confiance que Votre cœur, que Votre esprit, que toute Votre personne n’inspire? O Vous m’avez élevé à une grande hauteur.

Je lui écris une seconde fois, parce ce que le Général Klinger que je croyais déjà nommé au département de notre Université, m’a renvoyé ma lettre, ne pouvant la remettre officiellement, parce qu’il n’est pas encore nommé. Daignez, Sire, le faire nommer, conformément à Votre promesse. Nous aurons doublement besoin de lui, si la personne, à qui nous sommes redevables de notre première constitution et de tant d’esclavage, entre dans la commission des écoles2.

Que le ciel veille sur Vos jours! Qu’il Vous accorde un bonheur égal à celui dont Vous m’avez comblé!

Parrot

14. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat, à la veille du 30 janvier 1803]1


Sire!

Je me suis acquitté de la commission, que Vous m’avez donnée2. Puisse-je m’en être acquitté de manière à prouver à V. M. que j’ai senti tout ce qu’elle contient d’honorable pour moi! Croyez, Sire, que j’en suis touché, que jamais je n’oublierai combien Votre confiance m’élève, et que le souvenir que mon cœur en conserve me donnera la force de remplir tous mes autres devoirs. Recevez, Sire, mes actions de grâces pour ce nouveau bienfait.

Le Comité a surpassé mes espérances, et V. M. reçoit en ce moment un ouvrage aussi parfait que les circonstances le permettent. Pardonnez moi cette expression, Sire, parce que j’y ai eu la moindre part, tout le temps que j’ai pu dérober à ma santé et à mes autres devoirs me n’ayant pas permis d’y travailler autant que je l’enviais. Daignez honorer cet ouvrage de Votre approbation, mais d’une approbation qui mette le sceau au bonheur de deux petits peuples célèbres par les maux qu’ils ont soufferts et dignes par là de votre sollicitude paternelle