>, mais il reste encore plusieurs besoins de ce genre qui ne Vous furent pas présentés alors parce que nous nous en tînmes au plus pressant; nous n’osions tout espérer. Daignez Vous souvenir, Sire, que je ne m’adressai pas directement à Vous pour cet objet. Ces besoins consistent outre les bâtiments pour l’économie de l’Université en général et des instituts en particulier, orangeries et serres pour le jardin botanique, en un manège et des bains pour les étudiants. Ce dernier objet qui paraît le moins nécessaire est un des besoins les plus pressants; notre fleuve où se baignent les jeunes gens est traître et engloutit chaque année plusieurs victimes de l’imprudence. Tous ces besoins réunis forment un déficit total dans la caisse de l’Université de 364 541 Roubles.
Sire! Il est sûr que comparée aux bâtiments considérables et nombreux qu’elle produira cette somme n’est pas disproportionnée. Mais c’est de Vous que nous espérons ces sacrifices considérables, de Vous qui en faites tous les jours pour nous et pour tous Vos sujets. Cette idée me peine, m’attriste extrêmement. Il me semble qu’en Vous demandant ces sommes je Vous prive d’autres jouissances. Je suis, il est vrai quant à moi, indifférent pour les richesses, mais je sais comment Vous employez les Vôtres – je sais davantage. – Mais il ne fallait pas me mettre dans le cas de revenir une troisième fois.
Ma raison me dit, il est vrai, que nous avons fait tout ce qui est humainement possible pour diminuer ces sommes; que nous avons produit toutes les sommes de fondation de nos collections et appareils par des épargnes qu’une sage économie de nos revenus ordinaires nous a permis de faire, tandis que le seul article de l’histoire naturelle et de la physique à l’Université de Moscou Vous coûte 50 000 Ducats par l’achat du Cabinet de la comtesse Jablonska2; elle me dit que les bâtiments des Universités de Charkow et de Casan coûteront beaucoup plus que les nôtres, et que dans tous les bâtiments que nous construisons nous n’avons pas songé à fournir des logements à nos professeurs quoiqu’à Moscou les professeurs soient logés ou indemnisés aux frais de la Couronne. Mais le sentiment est plus fort que ces raisons, parce que c’est de Vous que j’espère ces sacrifices, moi qui voudrait me sacrifier pour Vous.
Que le ciel Vous récompense de Vos bienfaits et me punisse s’il le faut de Vous les avoir demandés!
Parrot
40. G. F. Parrot à Alexandre IER
[Saint-Pétersbourg], 1 février 1805
Sire!
Il y a quelques jours que j’ai pris la liberté de Vous dire que j’avais quelques remarques bien importantes à Vous communiquer; je ne prévoyais pas alors qu’il se présenterait sitôt un cas extrêmement pressant d’en faire usage. Daignez, je Vous en supplie, m’accorder quelques instants, le plus tôt possible; la chose est si pressante que je cherche un autre canal que l’ordinaire pour Vous faire parvenir plus tôt ces mots, il n’y a pas un jour à perdre. Sûrement Vous me saurez quelque gré de Vous avoir fait cette prière.
Parrot
41. Alexandre IER à G. F. Parrot
[Saint-Pétersbourg, 2 février 1805]1
J’avais espéré Vous donner Samedi un après-dîner entier, n’en ayant pas libre jusqu’à ce jour-ci. Si ce que Vous voulez me dire peut être remis jusque-là, cela m’accommoderait beaucoup, si non et s’il est d’une nécessité absolue, que je Vous voie aujourd’hui, passez chez moi à 8 heures, je pourrais Vous voir un moment.
[Paraphe]
42. Alexandre IER à G. F. Parrot
[Saint-Pétersbourg, 4 février 1805]1
Passez, je Vous prie à 7 h et ½ chez moi après-dîner.
43. Alexandre IER à G. F. Parrot
[Saint-Pétersbourg, 5 ou 6 février 1805]1
Il est urgent que Vous avertissiez Klinger et que Vous lui communiquiez le Plan, que Vous m’avez présenté pour qu’il soit absolument dans notre sens, quand le ministre lui parlera.
Tout à Vous.
[Paraphe]
44. G. F. Parrot à Alexandre IER
[Saint-Pétersbourg, 9 février 1805]1
Sire!
Depuis cet heureux Samedi je ne Vous ai point écrit. Je jouissais de ma félicité et travaillais pour Vous. Je voulais attendre de Vous écrire et de Vous voir que je puisse Vous présenter quelque chose de complet sur le sujet des requêtes2. – Mais je ne puis, je n’ose tarder plus longtemps. Mes affaires vont très mal et je me consume de dépit. Aujourd’hui il n’y aura pas de séance au Directoire. On a su éluder ce jour, et me voilà remis. J’ai été hier chez le Ministre. Je l’ai prié, supplié de changer cet arrangement. Il me répond: «Vous êtes le maître de retourner Vos affaires d’argent…» Et des écoles paroissiales? lui dis-je. – «Et bien, attendez» – Ces délais me font négliger mes nombreux devoirs à Dorpat. – «Attendez». Je le fixai une demie minute. Ce fut en vain, je le quittai.
Sire! Si vous croyez ma santé utile au bien des écoles, ayez pitié pour moi, donnez-lui des ordres précis, et daignez me voir encore auparavant. À présent je vois clair dans l’organisation de ce département, et je me sens pressé de Vous rendre compte d’un entretien que j’ai eu avec Klinger. – Mon héros! que j’ose nommer mon ami! C’est mon devoir qui me force à Vous tourmenter. Vous savez quelle félicité je goûte à être auprès de Vous. Cependant le ciel m’est témoin que chaque fois que je Vous demande une de ces heures de bonheur je me fais violence.
Parrot Vous aime de toute son âme.
45. Alexandre IER à G. F. Parrot
[Saint-Pétersbourg, 9 février 1805]
Des affaires qui ne souffrent aucun retard, m’étant survenues pour aujourd’hui, me mettent bien à contre cœur dans l’impossibilité de Vous recevoir cet après-dîner. Je Vous aurais destiné celui de demain si ce n’était jour du Comité1, ainsi je me trouve contraint de le remettre à Samedi.
Tout à Vous.
[Paraphe]
46. G. F. Parrot à Alexandre IER
[Saint-Pétersbourg], 18 février 1805
Sire,
L’ouvrage sur les requêtes est terminé, et j’ose espérer, j’ose Vous demander une heure pour Vous l’offrir, persuadé que ce travail sera agréable à Votre cœur. Il me l’a été infiniment et la perspective de gagner par là une occasion de Vous revoir, de Vous redire combien je Vous aime, m’a aiguillonné à le terminer promptement. Mon héros! Ces relations entre Vous et moi, uniques peut-être, répandent un charme délicieux sur ma vie et par les sentiments qui les ont fait naître et qu’elles nourrissent, et par l’emploi que j’en fais. Je puis mourir bientôt, j’en porterai la satisfaction d’avoir vécu autant qu’un particulier peut vivre. Et c’est à Toi, Alexandre! que je dois ce sentiment sublime! Sens-tu combien je dois t’aimer, combien tu es au-dessus de toute ma reconnaissance?
Les affaires de l’Université sont en bon chemin au Directoire et c’est encore à mon Alexandre, à Lui seul que je le dois. On a accordé les écoles paroissiales, sauf une seconde révision; c’est beaucoup de gagné. Klinger a parlé à cette occasion bien selon mon cœur. Il a été touché à la lecture. Le tout lui a beaucoup plu, et sur le champ il s’est déclaré fortement pour la chose et a emporté les suffrages.
Parrot Vous salue de toute son âme.
47. G. F. Parrot à Alexandre IER
[Saint-Pétersbourg], 24 février 1805
Sire!
Les écoles paroissiales sont décrétées! Dans 8 jours le Ministre les présentera à Votre sanction. Je suis chargé de faire quelques modifications dans le règlement, et je les ferai avec plaisir, persuadé moi-même qu’elles seront utiles au bien de la chose. Que je suis heureux! Soyez-le aussi, mon héros! Voyez tout le bien que Vous faites par là. Transportez-Vous en idée de hameau en hameau. Voyez la nombreuse jeunesse de trois nations opprimées s’instruire à devenir les soutiens de la félicité publique et consoler la génération présente des maux qu’elle a soufferts. O combien de bénédictions, de vœux, de prières ne s’élèveront pas vers le ciel des cabanes du pauvre cultivateur pour leur ange tutélaire! Je ne Vous parle pas de la gloire, que d’autres Monarques recherchent. Elle Vous cherchera, précisément parce que Vous êtes au-dessus d’elle.
J’ai eu moins de bonne fortune pour les fonds de nos bâtiments; on m’a rayé environ 90 000 Rbl., et les bains sont du nombre quoiqu’ils ne se montent qu’à 6000. J’aurais été si aise d’apporter aux étudiants un cadeau de leur Monarque qu’ils admirent avec l’enthousiasme de la jeunesse. N’est-il pas de moyen de réparer une défaite à cet égard?
Permettez-moi, Sire, de Vous rappeler l’objet des requêtes. Ma mission étant bientôt terminé la chose devient pressante, d’autant plus que peut-être Vous me chargerez de modifications pour lesquelles il faudra du temps. Je n’ai pas cessé de prendre des informations à cet égard, et chaque jour je me persuade davantage de l’importance, de la nécessité de se frayer la route entre Vos sujets et Vous, entre l’opprimé et le Trône. Elle est semée de ronces et d’épines, et Vous Vous tuez à faire le bien sans y parvenir. Permettez-moi de Vous offrir mes idées là-dessus. Vous les rejetterez si Vous les trouvez impropres, mais Vous aurez satisfait à un besoin cher à Votre cœur, moi à un de ces devoirs que mon amour du bien et mon amour pour Vous me commande impérieusement.
Ne Vous fatiguez pas de mon importunité. Dans quelques jours je quitte Pétersbourg, je rentrerai pour longtemps dans la carrière modeste à laquelle la providence m’a voué. Cette dernière affaire sera peut-être pour moi le chant du cygne.
Le ciel veille sur Vos jours!