Кафедра и трон. Переписка императора Александра I и профессора Г. Ф. Паррота — страница 69 из 183

Sire! daignez lire notre justification et jetez un coup d’œil sur notre activité. Faites Vous donner le rapport de Klinger après son voyage ici. Et encore dans ce rapport ne verrez Vous que les résultats de nos efforts pour réaliser Vos vues. Vous n’y verrez pas les désagréments, les combats, les dégoûts continuels que ces résultats nous ont coûtés. Et malgré ces efforts continuels à faire notre devoir nous devons perdre les bonnes grâces de notre seul protecteur parce qu’un homme comme Richter chargé des gémisseurs de toute la province nous hait! Sire! Rien de plus facile à l’Université que de faire ses devoirs en apparence, d’être irréprochable dans le sens du Gouv. Richter et de ses semblables; des visites chez les grands, des rapports et des tabelles, quelques punitions bien éclatantes de quelques étudiants, et surtout la négligence totale de ses vrais devoirs – voilà ce qu’il faut pour se concilier ces gens-là. Sire! Sire! Vous savez Vous-même que partout il n’existe que des formes; conservez l’institut où l’on veut la réalité, cette réalité détestée dans Votre Empire. L’instruction publique est Votre ouvrage, celui de tous qui doit jeter les plus profondes racines, celui qui fixera l’opinion de la postérité sur Votre règne; restez lui fidèle. Et

Votre Parrot.

Il Vous est resté fidèle, il le sera jusqu’au dernier soupir.


P. S.

Une lettre que j’ai reçue récemment de l’Allemagne fait présenter une campagne prochaine sur la Vistule. Ne faites pas passer Votre armée en Suède. Concentrez Vos forces sur notre côté.

137. Alexandre IER à G. F. Parrot

Saint-Pétersbourg, 1 septembre [1808]1


Quand j’ai des torts j’aime à en convenir. C’est mon cas vis-à-vis de Vous et j’en possède toutes les preuves; aussi je m’empresse de réparer mon injustice et de Vous l’avouer avec franchise. J’espère éviter à l’avenir des cas semblables. En attendant, je joins ici ce que Vous m’avez demandé2 et je regrette vivement toute la peine que j’ai pu Vous causer.

Recevez l’assurance de mon estime qui Vous a été vouée depuis longtemps et qui n’a fait que s’accroître par ce que vient de se passer entre nous.

[Paraphe]

138. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat], 3 septembre 1808


Me voici rentré chez moi, mon Bien-Aimé, mon digne Alexandre! Je veux employer les premiers moments après Votre passage pour Vous dire quelques mots que j’aurais tant désiré Vous dire de bouche; je comptais que Vous mettriez pied à terre; j’étais si gêné, si peiné de ne pouvoir Vous ouvrir mon cœur. J’étais obligé même de contenir ma physionomie, car le chambellan Osarovsky m’a remis ce matin Votre lettre à la station en présence de toute l’Université qui Vous attendait et d’autres personnes, et je savais que j’étais observé.

Sentez-Vous combien Vous m’avez rendu heureux par Votre lettre? O combien elle m’est chère! Je Vous l’avoue, j’étais en doute. Ma raison me disait que Vous Vous étiez éloigné de moi et je ne savais que lui répondre. Mais mon cœur me répétait sans cesse que cela est impossible. O que je suis heureux que mon cœur a eu raison!

Je relis Votre lettre. Alexandre! Votre âme est noble, élevée. Oui, elle ferait mes délices, cette lettre, fût-elle adressée à un autre qu’à moi. Lire dans une âme comme la Vôtre est une grande jouissance, mais y lire comme j’y lis, mon Bien-Aimé, c’est la plus grande de toutes. – Je puis donc continuer de Vous aimer sans me reprocher de faiblesse, sans paraître ridicule à mes propres yeux, je puis sans rougir abandonner mon cœur à mon sentiment qui lui est devenu nécessaire. Mon âme Vous suit sur Votre route. Que ne puis-je Vous suivre en effet! – J’ai une bien forte raison de le désirer, plus forte que lorsque Vous partîtes pour la Moravie. – Relisez cette dernière ligne et pesez-la, je Vous en conjure.

Je relis encore Votre lettre et je suis tenté de m’accuser d’ingratitude. Pendant le peu d’instants que je Vous ai vu je Vous ai dit un mot qui Vous a fait de la peine. Combien cela m’en a fait à moi-même! Mais pouvais-je Vous cacher la vérité? Oui, il est malheureusement vrai que nous avons 25 étudiants moins que le semestre passé, et d’après les nouvelles que nous avions reçues des provinces nous en devions avoir au moins 20 de plus. C’est une partie bien considérable pour l’Université et pour Vous-même. Vous en avez senti la cause. Détruisez cette cause. Rendez aux Statuts, à la constitution que Vous nous avez données leur vigueur naturelle. Les lois suffisent, croyez m’en. Je ne suis pas prévenu; mon sentiment moral ne me permet pas de l’être dans cette affaire. Croyez que je tiens plus aux mœurs des étudiants que ceux qui Vous indisposent contre eux. Je vois de près, Vous de loin; je vois par mes propres yeux, Vous par les yeux de nos ennemis. La haine qu’on nous porte ne meurt pas. Je croyais il y a quelque temps qu’elle s’affaiblissait. Mais Vous-même m’avez averti du contraire. Là Vous pouviez voir par Vos propres yeux, et l’expérience – cette indigne manœuvre du Gouverneur Richter m’a trop bien prouvé que Vous aviez raison. Notre Ministre Vous a-t-il présenté nos remontrances? Avez-Vous reçu ma lettre du 28 juin? Si Vous n’avez reçu ni l’une ni l’autre, agissez par confiance en moi. Retirez l’ordre que Vous avez donné, sur ma parole. (Si pendant Votre voyage un étudiant se trouvait arrêté à tort ou de droit, qui déciderait de son sort? Devrait-il rester enfermé avec les soldats que jusqu’à Votre retour?) Votre confiance en moi Vous a-t-elle jamais abusé? Je suis encore Votre Parrot; dans un sens je le serai toujours, et je n’ai d’autre vœu que de l’être de tout sens. L’Université de Dorpat est Votre ouvrage. C’est ce qui m’attache à elle si fortement; sans cette idée je Vous eusse déjà demandé une autre place, où je n’eusse aucun point de contact avec la noblesse du cercle de Dorpat et avec les Richter.

Je Vous remercie au nom du cultivateur Livonien pour avoir terminé sa constitution1. Ç’a été la première lueur qui a frappé mon cœur dans la nuit qui l’entourait. J’ai partagé la joie de notre Sivers. – De notre Sivers! Lorsqu’il m’a écrit cette nouvelle il avait oublié qu’il est ruiné et que Vous n’avez pas encore réparé les torts que son invincible amour des hommes a fait à sa fortune. Il était heureux. La Couronne peut-elle être une jouissance à mon Alexandre s’il ne saisit pas l’occasion de répandre ses bienfaits sur un homme comme Sivers, tandis que l’importunité lui arrache tant de dons?

Dieu veille sur Vous – sur Vos jours! Retournez – heureux et satisfait! Je Vous ai dit bien des choses dans cette lettre. Je sens qu’il faudrait un commentaire. Si j’étais bien sûr que Vous la receviez je Vous ferais ce commentaire. Écrivez-moi deux mots je Vous en supplie; dites-moi s’il Vous faut un commentaire.

Votre Parrot, Tout entier Votre Parrot


envoyée à Erfurt

139. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat], 4 novembre 1808


Il n’y a que 10 jours que je Vous ai écrit1, Mon Bien-Aimé, et voici déjà une seconde lettre. Ne Vous fâchez pas de mon importunité; le sujet est très important. Il Vous regarde personnellement et l’Université. Plusieurs gazettes ont annoncé que Vous avez promis au Duc de Weimar de permettre aux Livoniens et Courlandais de faire leurs études à l’Université de Jena2, et le public explique cette permission comme dérogeant au § 17 de l’acte de fondation de l’Université de Dorpat en vertu duquel quiconque veut obtenir un emploi qui suppose des connaissances scientifiques doit avoir étudié trois ans à l’Université de Dorpat ou à une autre université de l’Empire russe.

Je n’ai pas douté un instant qu’il n’y ait ici un mésentendu. Vous n’avez sûrement pas voulu nous frustrer d’une grande partie de nos étudiants et contredire l’acte de fondation que Vous nous avez donnée. Mais il existe un Ukase de l’Empereur Paul qui défend aux sujets de l’Empire russe de faire leurs études aux universités étrangères. Cet Ukase a été donné, si je ne me trompe, en 1799 sans avoir été révoqué depuis, et l’Université de Jena croit que l’absence des Livoniens et Courlandais n’a que cet Ukase pour cause3. Veuillez, je Vous supplie, expliquer la chose par un Ukase formel qui porte la révocation de l’Ukase de l’Empereur Paul et en même temps instruise le public que par là Vous n’entendez pas déroger au § 17 de l’acte de fondation de l’Université de Dorpat, mais qu’au contraire Vous exigez que ce § reste en vigueur et soit exécuté ponctuellement et que la jeunesse russe ne continue ses études à l’étranger qu’après avoir étudié 3 ans à une Université de l’Empire russe. S’il ne s’agissait que de rivaliser avec les universités étrangères pour l’instruction de Vos sujets, Sire, je ne Vous ferais aucune prière à cet égard, persuadé qu’à Dorpat l’instruction est aussi parfaite qu’à Jena ou Göttingen. Mais nous avons contre nous la réputation très méritée de ces anciennes universités, la discipline beaucoup plus sévère que nous exerçons envers nos étudiants et l’antipathie de la noblesse surtout de Courlande encore toujours irritée de ce que l’Université de Dorpat n’est pas à Mitau; en sorte que quelque savants que soient nos professeurs, quelque exactitude ils mettent à remplir leurs devoirs, nous perdrons cependant le plus grand nombre de nos étudiants dès que le § allégué de notre acte de fondation cessera d’être en vigueur. Les universités étrangères ont elles-mêmes de pareils privilèges. Halle, Göttingen, Jena, Tübingen, toutes ont le même privilège pour les sujets du pays. Les universités russes qui ne font que de naître et qui ont dix fois plus de difficultés à surmonter que celles d’Allemagne devraient-elles le perdre?

Vous avez eu un accident en route d’ici à Pétersbourg, mais sans malheur. Le Ciel protège mon Alexandre et la Russie. Adieu, mon Bien-Aimé! Conservez Votre affection