Кафедра и трон. Переписка императора Александра I и профессора Г. Ф. Паррота — страница 82 из 183

Il m’en a coûté pour faire passer cette représentation au conseil de l’Université, non que chaque membre ne soit pleinement convaincu de sa nécessité, mais un grand nombre est intimidé par l’idée que Vous êtes encore fâché contre nous depuis l’affaire du prince Lobanof. Je les ai rassurés; je leur ai dit que Vous êtes trop juste pour confondre deux choses si différentes, Votre cœur trop bon pour pouvoir être encore irrité après avoir puni. Justifiez-moi; accordez-nous non seulement notre demande, mais veuillez encore nous témoigner Votre satisfaction sur cette démarche, qui, je puis Vous assurer, prouve mieux qu’un silence timide et criminel notre amour pour le bien public et Votre personne.

La représentation officielle part par le même courrier. Veuillez la demander si on ne Vous présente pas aux premiers jours. La chose est très pressante; nous devons obéir si Vous ne Vous décidez pas d’abord.

Je Vous tracasse, je le sens; mais c’est mon sort comme le Vôtre est celui d’être Empereur. N’en veuillez pas pour cela à

Votre Parrot.

173. G. F. Parrot à Alexandre IER

Saint-Pétersbourg, 30 décembre 1811


J’arrive en ce moment à Pétersbourg. Je n’ai qu’un désir, celui de revoir mon Bien-Aimé qui m’a laissé 15 mois sans un signe de vie, quoique mon cœur eût un si pressant besoin d’en recevoir. J’ai différents objets importants à Vous présenter, ; veuillez m’accorder bientôt une de ces heures délicieuses qui font le bonheur de ma vie, s’il est possible encore avant le Nouvel an pour que je puisse commencer mon travail pour Vous avec l’année. – Avec quelle joie je recevrai depuis si longtemps les premières lignes crayonnées de Votre main! Ne cessez jamais d’aimer un Être qui, vivant ou mourant, est tout entier à Vous.

Votre Parrot

174. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg], 3 janvier 1812


Permettez-moi de me rappeler au souvenir de mon Bien-Aimé. Vos occupations sont trop nombreuses pour que je n’aie pas lieu de craindre d’être oublié; veuillez m’écrire quelques mots qui m’assurent que j’aurai le bonheur de Vous voir. C’est un défaut de physicien de vouloir toujours être certain; c’est le faible de l’homme sensible de souffrir de l’incertitude. Soyez indulgent sur ce défaut que Vous connaissez à

Votre Parrot.

175. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg], 7 janvier 1812


Voilà 9 jours que je suis ici, dépensant inutilement ce que je dois à la subsistance de ma famille, et sans pouvoir apprendre si Vous voulez me voir ou non. Si j’ai encouru Votre disgrâce, daignez au moins me le dire. Mon cœur ne m’accuse pas de l’avoir méritée, moins encore le mépris que m’annonce Votre silence absolu. – Le mépris! Grand Dieu! Souvenez-Vous qu’autrefois Vous m’avez assuré si souvent mettre un haut prix à mon estime, à mon attachement pour Vous et qu’il y a un an Vous avez blâmé mes doutes sur Vos sentiments à mon égard.

Avez-Vous des reproches à me faire, fondés ou non, faites-les-moi. Si j’ai des torts vis-à-vis de Vous, je les reconnaîtrai si volontiers; et si je n’en ai point Votre cœur se déchargera d’un soupçon qui doit Vous faire souffrir Vous-même.

Vous-même devez désirer Vous décider vis-à-vis de moi. Quelque coupable que je puisse Vous paraître – Grand Dieu! moi coupable envers Vous! – il est de Votre intérêt de savoir à quoi Vous en tenir. Croyez qu’en Vous demandant cette décision je veux au moins autant Votre bien-être que le mien. J’ose Vous prédire qu’il viendra un jour où, éclairé sur le vide terrible qui Vous entoure, Votre cœur cherchera en vain un ami dans le sein duquel il puisse déposer ses peines secrètes, ces peines cuisantes qui ne perdent leur poison dévorant que par l’épanchement de l’amitié. Il se reprochera d’avoir méprisé le seul ami qui s’est obstiné pendant 9 ans à Vous rester. Ce que je souffrirai de Vous avoir perdu ne Vous dédommagera pas. – O combien je souffre déjà en écrivant ces mots!

Votre vrai Parrot

176. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg], 13 janvier 1812


Vous m’avez fait exhorter à la patience il y a quatre jours. Croyez, mon Bien-Aimé, que ce n’est ni la patience, ni la persévérance qui me manquent. Mais je n’ai d’autre temps que ces vacances; je dois être le dernier janvier à mon poste, et l’exécution des objets importants que j’ai à Vous présenter exigera un séjour de ma part de plusieurs semaines. Veuillez jeter un coup d’œil sur une situation. Mon voyage n’est pas officiel et ne peut l’être; non seulement je me consume en frais inutiles, mais je ne puis prolonger mon séjour que par Vos ordres précis. Dévoré du désir de Vous être utile je me trouve pour ainsi dire toujours entre deux chaises, et par conséquent sans à plomb. À chaque effort que je fais je risque une chute. – O croyez que j’ai de la persévérance, de la patience, et que ce n’est pas sans de fortes raisons que je Vous prie de Vous hâter. Un simple coup d’œil sur les propositions que je Vous fais depuis tant d’années Vous prouvera aisément que je ne veux pas Vous occuper d’objets de peu d’importance.

Ne cessez pas d’écouter

Votre Parrot.

177. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg], 25 janvier 1812


Il ne me reste plus que peu de jours à rester ici, mon devoir me prescrivant d’être le 1er février à Dorpat. Dites-moi enfin, je Vous en supplie, si Vous voudrez me voir. Je ne Vous dirai pas (car je Vous l’ai déjà dit) combien j’ai souffert de cette incertitude pendant 27 jours. Mais ce que je dois Vous dire, c’est qu’outre les objets concernant l’université de Dorpat et l’instruction publique en général, j’en ai encore de bien importants à Vous présenter.

D’abord je voulais Vous remettre les télégraphes qui, comme je Vous l’ai déjà écrit, ont réussi presque au-delà de mon attente. Les comptes en outre doivent être payés, car sûrement Vous ne voulez ni ma ruine ni mon déshonneur.

Puis je voulais profiter de ce temps pour faire les expériences relatives à la nouvelle espèce de boulet de canon que je Vous ai proposé. Plus j’examine la chose, plus je la trouve bien calculée. Et si ces boulets font seulement le double de l’effet de boulet ordinaire, ces avantages sont inappréciables.

Enfin je voulais Vous proposer une amélioration de la poudre à canon applicable à la poudre déjà faite, et exécuter les expériences qui doivent décider de cette invention.

178. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg], 28 janvier 1812


Sire!

Votre silence absolu me prouve, plus énergiquement que tout ce que Vous auriez pu me dire que Vous voulez mettre fin à nos relations particulières. – Il ne me reste donc plus qu’à implorer Votre justice en Vous priant d’accepter les comptes des frais que les télégraphes ont causés et de me faire remettre avant mon départ la somme de 1850 R. 82 cop. comme l’excédent de ces frais par-dessus la somme de 1000 Rbl. que Vous m’aviez confiée en attendant pour cet objet, la somme totale se montant à 2850 R. 82 cop. Elle paraît excéder, il est vrai, de beaucoup la somme qu’il y a 3 ans j’avais jugée nécessaire à la construction de deux télégraphes. Mais cette somme contient en outre

!!!!!!!!!

Ces télégraphes, Sire, sont Votre propriété et je Vous supplie de vouloir bien m’assigner quelqu’un à qui les remettre car leur existence à Dorpat ne m’embarrasse pas moins que l’impossibilité de les payer.

En ce moment où je perds le bonheur de Vous être plus proche que le reste de Vos sujets, je crois devoir à Vous et moi-même de Vous présenter une autre espèce de compte sur tout le temps que ces relations heureuses ont duré.

Je ne Vous rappellerai pas le détail du commencement de ces relations si rares. Vous avez la gloire d’être venu au-devant de moi, d’avoir pressenti que mon cœur n’était pas indigne du rapprochement sublime que Vous avez voulu. Je me livrai sans réserve, avec enthousiasme à ce sentiment délicieux. Cependant, quelque sûr que je fusse de mes principes, je n’oubliai pas la faiblesse de la nature humaine et exigeai comme condition indispensable du contrat de notre amitié que Vous ne Vous laissiez jamais séduire à m’offrir des bienfaits qui eussent pris la teinte des grâces ordinaires; j’étais content de Votre cœur.

J’ai tenu parole. L’ordre de Wladimir, Vous savez que j’ai été forcé de l’accepter après avoir déclaré auparavant au Ministre que je n’en voulais pas. Vous avez payé les frais de trois de mes voyages ici, parce que je ne pouvais absolument pas y subvenir. Bref: j’étais pauvre lorsque je Vous approchai et je le suis également en Vous quittant, et en surplus en butte à mille ennemis que je me suis faits en Vous servant, et qui nommeront Votre éloignement une disgrâce et traiterons en disgrâcié l’homme qui autrefois leur était redoutable et déjouait si souvent leurs manœuvres.

O! si jamais l’envie Vous surprenait de nouveau de rapprocher de Vous une âme sensible et honnête – songez à Parrot, et repoussez cette malheureuse idée. Ne répétez pas ces déchirements de cœur que je souffre depuis un an. Pendant 8 ans j’ai possédé Votre cœur et par lui un bonheur qui m’élevait au-dessus de moi-même et du sort. J’étais heureux comme jamais mortel ne l’a été. En revanche je Vous ai aimé de toute mon âme; je Vous ai servi neuf ans en raison de cet amour. J’ai pris toutes les formes; je me suis plié à tous les rôles; je me suis formé à toutes les espèces de travaux pour Vous être utile; je Vous ai dit la vérité dans tous les cas, souvent la vérité la plus austère, sans ménagement, car je Vous estimais autant que je Vous aimais. Nous sommes donc acquittés l’un envers l’autre. – Voilà ma consolation dans ce moment où je Vous perds. Voilà le coussin sur lequel je reposerai ma tête avec sécurité au moment où je quitterai le reste de ce qui m’est cher dans ce monde. Un seul regret me suivra dans l’éternité, celui de n’avoir pu Vous mettre sur la voie que Vous cherchiez dans les premières années, la voie qui Vous eût fait l’idole de l’humanité, la seule qui à cette époque terrible puisse Vous garantir et la vie et la couronne. – Adieu, mon Alexandre! – Pardonnez-moi ce mot pour la dernière fois.