Кафедра и трон. Переписка императора Александра I и профессора Г. Ф. Паррота — страница 87 из 183

Votre Parrot

197. G. F. Parrot à Alexandre IER

Saint-Pétersbourg, 16 août 1814


Me voici à Pétersbourg. Quelques rues seules me séparent encore de mon Empereur chéri. – Quelques rues seulement? Cette idée fait mon bonheur; elle remplit mon âme et l’élève. – Accordez-moi bientôt quelques instants et que je lise dans Vos yeux ce que mon cœur me répète sans cesse: Il t’aime toujours1.

Votre Parrot

198. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg], 4 janvier 1816


Sire,

Depuis 3 semaines je me consume en attente1. De grâce daignez me dire le plus brièvement que Vous voudrez si c’est avec quelque espérance de succès que je sacrifie ici mon temps et la modicité de mes moyens. Trouvez-Vous injuste cette modeste prière de

Votre Parrot.

199. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg], 17 janvier 1816


Sire!

Les moyens pécuniaires, que j’ai pu vouer à l’espérance de satisfaire à un devoir cher à mon cœur, touchent à leur fin sans que j’aie pu apprendre si j’ai lieu de me flatter encore de cette espérance. Croyez, Sire, qu’il m’en coûte de Vous parler de moyens pécuniaires. Mais une nécessité impérieuse m’y force. Daignez m’écrire deux mots qui m’instruisent de Votre volonté, afin que, si elle est contraire à mes vœux, je cesse de faire inutilement tort à ma famille en prolongeant sans but mon séjour ici.

Votre Parrot


La nécessité absolue où je me trouve de Vous prier de ne plus différer le moment de me recevoir (cas qui jusqu’ici n’avait pas eu lieu) ne serait-elle pas, Sire, un indice de la Providence que ce moment est précisément celui où je pourrais Vous être le plus utile?

200. G. F. Parrot à Alexandre IER

Saint-Pétersbourg, 24 janvier 1816


Sire!

Vous n’avez jamais été cruel; mais malheureusement je suis destiné à en fournir le premier exemple. J’ai quitté Dorpat le 12 décembre, jour si mémorable pour moi, et je suis depuis à Pétersbourg à attendre Votre simple décision si Vous voulez encore me voir ou non, sans pouvoir l’obtenir. Tout ce que j’ai pu vouer de moyens à cette existence est entièrement épuisé et les devoirs de ma place m’appellent à Dorpat.

Si je dois, Sire, regarder Votre constance à ne pas m’honorer d’une réponse<à tant de lettres>comme une réponse négative, daignez lire la copie suivante de Votre dernier billet écrit en mars 18121:

«Je Vous remercie beaucoup pour le papier inclus dans Votre lettre; je l’ai lue avec émotion et sensibilité. Croyez moi pour toujours. Tout à Vous.

J’avais parlé au Ministre de la guerre sur un témoignage à Vous donner de mon contentement pour les télégraphes et je l’avais chargé de sonder ce que pourrait Vous être le plus agréable. J’aime tout autant le faire directement par ces lignes et je vous prie de me le dire franchement».

Je Vous répondis, Sire, que le commencement d’une guerre qui devait décider de Votre couronne et de Votre existence n’était pas le moment de Vous rien demander pour moi-même, mais que lorsque Vous aurez terminé glorieusement la campagne si Vous voulez Vous souvenir de moi, alors je Vous prierais de me donner les moyens de faire un voyage de 18 mois à l’étranger. Les raisons que j’avais alors étaient la débilité de ma santé (qui dans ces dernières six semaines a fait des progrès funestes), le désir si naturel de revoir mon pays natal et sa belle nature, le besoin de revoir après 19 ans d’absence l’Europe savante et de renouer par là mes relations littéraires interrompues par les troubles politiques .

Aujourd’hui je dois ajouter à ces motifs celui de me soustraire pour quelque temps à l’attention des Grands et diminuer par là l’envie qu’ils ont de m’opprimer et qui en s’est que trop manifestée pendant Votre absence. Vous doutez, peut-être, Sire, de cette persécution qui va s’établir contre moi, à raison de ce que Votre disgrâce peut rester inconnue; mais quand elle le pourrait, Sire, je ne le voudrais pas. Vous avez été le premier à manifester nos relations et je n’en ai avoué que ce que Vous-même en aviez fait paraître. À présent c’est à moi à dire ouvertement que nos relations n’existent plus , car je crois au-dessous de moi de jouir de la fausse réputation de Votre confiance. Vous voyez, Sire, que précisément à raison de ce dernier point je ne puis me passer d’une réponse. Daignez me l’accorder sur cette sixième lettre; je l’attends chez Gessler ou même dans Votre antichambre, si tout est que Votre valet de chambre m’en permette l’accès. – Tel est la situation où je me trouve aujourd’hui, d’attendre de la complaisance d’un valet la possibilité de percer jusqu’à Vous. Sire! Suis-je donc si différent de l’homme à qui il y a 13 ans Vous accordiez Votre estime, Votre confiance, Votre amitié? Il y a 4 ans que je possédais encore tous ces trésors. Qui m’en a frustré?

Vous voyez, il est vrai, que mon cœur souffre . Mais néanmoins il n’a pas cessé un instant de Vous appartenir comme tout

Votre Parrot.

201. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Saint-Pétersbourg], 31 janvier 1816


Sire!

Vous avez terminé la série des fêtes qui font la satisfaction de Votre auguste famille. Daignez à présent m’accorder une fête; car mon sentiment me dit que si Vous m’avez laissé attendre si longtemps, ce n’était pas pour m’éloigner de Vous.

Vous connaissez par ma dernière lettre le double embarras où je me trouve. Le 4 de février je dois être à Dorpat où mon devoir m’appelle. Un ordre seul de Votre part peut m’en dispenser. Mon cœur se resserre à la seule idée de la possibilité que je partisse sans avoir eu le bonheur de Vous voir ou même sans réponse.

Votre Parrot

202. G. F. Parrot à Alexandre IER

Saint-Pétersbourg, 5 février 1816


Sire!

Lorsque V. M. I. recevra ces lignes je serai déjà en route pour Dorpat. Permettez-moi d’employer les dernières heures de mon malheureux séjour à Pétersbourg à présenter à V. M. le tableau vrai de ma situation pendant ce séjour, afin qu’Elle juge si je pouvais agir autrement que je n’ai fait.

La manière dont V. M. m’avait fait savoir en Août 1814, qu’Elle ne pouvait me recevoir, m’avait fait pressentir que Son opinion de moi était changée et que je hasardais tout en comptant encore sur Ses anciens sentiments. Pénétré de ce pressentiment douloureux j’écrivis à V. M. quelque temps après Son retour de l’étranger pour Lui demander avec loyauté si Elle jugeait à propos de se détacher de moi ou si je pouvais encore compter sur la confiance dont Elle m’avait honoré pendant onze ans. Je voulais dans la supposition du premier cas Lui épargner le regret de me savoir à Pétersbourg inutilement et à moi les désagréments de ce voyage.

Le silence de V. M. me laissa dans l’incertitude et j’obéis à la voix de mon cœur qui me prescrivait de faire les dernières tentatives pour m’assurer des intentions de V. M. Je partis le 12 décembre et je Lui annonçai d’abord mon arrivée. Depuis 6 lettres m’ont rappelées au souvenir de V. M., les dernières Lui disant positivement que mon devoir et l’épuisement de mes moyens me forçaient à retourner. Tout ce que j’ai pu apprendre pendant ces 8 semaines, c’est que V. M. m’a fait dire par Ses valets de chambre qu’Elle me répondrait. Une maladie grave, accompagnée de crachements de sang, est survenue et a retardé mon départ déjà fixé en me faisant sentir dans un autre sens combien funeste m’était mon séjour ici.

Sire! Je ne fatiguerai pas V. M. par le récit inutile des frais et autres dommages considérables que ce voyage m’a causés; mais j’ose appuyer ouvertement sur le sentiment qui me les a fait supporter avec satisfaction tant que j’avais de l’espérance. Ce sentiment était désintéressé, pur, comme celui qui m’a animé dans toutes mes relations vis-à-vis de V. M. et qui ne me quittera dans aucune situation de la vie. Si dans ma lettre du 24 janvier, n’espérant plus rien après 5 tentatives infructueuses, j’ai osé rappeler à V. M. l’offre qu’Elle me fit en 1812 de me donner un témoignage de son contentement relativement aux télégraphes et Lui demander à cet égard les moyens de faire un voyage à l’étranger, ce n’était sûrement pas l’appas de l’argent qui m’y portait, mais le désir de rétablir ma santé ruinée, souffrante de plus en plus par chaque jour que je séjournais ici, et pour étendre la sphère de mon activité littéraire, par conséquent pour être à la suite plus utile et plus longtemps utile.

Je suis forcé de quitter la plume pour prendre de la médecine qui me donne les forces pour continuer. Je n’omets pas cette remarque, parce qu’il est utile que le vainqueur de Napoléon sache combien son silence seul peut faire de mal à un honnête homme.

Sire! ne jetez pas un œil de dédain sur un homme qui avoue souffrir de Vous perdre , sur un père de famille qui enlève aux siens leur subsistance pour savoir seulement si Vous voulez qu’il Vous soit encore attaché comme autrefois.

Le sort est jeté. V. M. veut que je ne voie plus en Elle que le Souverain de la Russie. Elle en a sûrement Ses raisons qui Lui paraîtront justes. Je n’en appelle point à l’avenir qui me justifiera; je n’en appelle point au passé qui me justifie déjà. Mais j’en appelle au noble sentiment de V. M. pour la manière dont il Lui a plu d’opérer la séparation qu’Elle juge nécessaire. Je L’avais priée de la faire dans le caractère de loyauté qui nous avait réunis. Elle me l’a refusé et m’en déclare par là indigne. Voilà ce qui double ma peine, et si un sujet osait dire à un Souverain qu’il a tort, je dirais à V. M. qu’Elle a tort en ce point. Quel crime ai-je commis? Depuis 13 ans, Sire, je n’ai vécu que pour Vous